02. Réputation
Un peu chelou, le gamin, non ? Plus jeune, il foutait vachement froid dans le dos, quand même. Pas comme les autres Malveaux. Ah ça, non, pas du tout. Lui, c’était vraiment le petit taiseux de la bande, qui collait les autres gamin.e.s de la famille à défaut de savoir avec qui trainer. Enfin, surtout au collège. Ouais, au lycée, il a commencé à faire bande à part. Toujours aussi taiseux, le petit sourire de connivence de la famille qui s’étire avec de grands soupçons de sarcasme sur ses lèvres quand vous croisiez son regard. L’air de suffisance qui ne renvoie pas à la confiance empreinte de justice habituelle, non. Non, chez lui, ça avait l’air de dire au monde entier qu’il était meilleur que le reste. Les pauvres Malveaux, quand même. Un vrai ingrat. Il n'avait même pas une once de reconnaissance en lui alors que rien ne les obligeait à l’accueillir, à l’élever. Il aurait pu rester avec sa mère, dans les bas-fonds de la ville. Pas pour rien qu’il n’est pas devenu grand-chose, en même temps : il n'a pas l’étoffe du reste de la famille. Même si, il faut bien l’avouer, il s’est calmé, quand même. Ils ont peut-être fini par l’exorciser, qui sait vraiment. Maintenant, c’est devenu un brave gamin. Faut le voir bosser dans les rues de la ville, été comme hiver, avec lenteur, certes. Il a l'air plus épanoui, depuis qu'il évolue loin des autres Malveaux. Plus abordable, presque. Et puis, il y a bien un truc qu’on ne peut pas lui reprocher : il est toujours présent à tous les offices de son oncle. Dans le fond de la paroisse, d’accord, mais présent. On peut pas dire pareil des autres mioches du coin.